vendredi 25 avril 2008

Ouganda : le processus de paix dans l'impasse

Si vis bellum, para pacem? C'est un peu la tactique, vieille comme le monde, de l'armée de résistance du seigneur de Joseph Kony. Ayant compris qu'il échapperait difficilement à un jugement devant la cour de justice internationale, celui-ci reforme ces troupes et préparerait une nouvelle offensive.

www.daylife.com

Les négociations de paix de Juba, entamées en 2006, semblaient prometteuses, et les négociateurs de l'Ouganda et du Sud-Soudan croyaient toucher au but. Alors que l'on attendait plus que la signature de Joseph Kony, celui-ci... ne s'est pas présenté à la cérémonie de signature le 10 Avril, prévue dans la ville frontière de Rwi-Kwangba.

Selon IWPR et l'UNICEF, une nouvelle vague d'enlèvements d'enfants a eu lieu en RDC, Centrafrique, et Sud-Soudan. La LRA, qu'on supposait en train de désarmer, aurait en fait un nouveau camp d'entraînement dans le nord-est du Congo à Garamba, après avoir été repérée en février et mars dans le sud de la centrafrique.



Cette carte de la région permet de comprendre la dimension régionale du conflit : les quatre pays concernés par la LRA sont tous frappés par une grande instabilité et n'ont souvent aucun contrôle sur leurs frontières. Le Sud du Soudan est gouverné par les anciens rebelles, qu'on a vu soutenir (argent et nourriture) la LRA tout en tentant de les convaincre de négocier une paix lors de pourparlers à Juba (Sud Soudan), la RDC est toujours traversée de guerres (Itruri, Kivu, etc), le pouvoir centrafricain ne tient qu'à un fil. La guerrilla traverse donc les frontières tracées au hasard dans la jungle par les puissances coloniales françaises, belges et anglaises!

http://image.guardian.co.uk

Alors que le cessez-le-feu conclu entre la LRA et l'armée ougandaise a expiré, Kony s'attend à une attaque des troupes ougandaises, et tente de donner une dimension régionale à sa guerrilla. En recrutant de force des hommes congolais, centrafricains et soudanais, il se donne les moyens de déstabiliser l'ensemble de la région : le régime de Khartoum a longtemps financé la LRA, pour faire payer à l'Ouganda son soutien aux rebelles du Sud-Soudan. Certains analystes affirment que ce soutien continue, avec l'idée de retourner la LRA contre le Sud-Soudan dans le cas où le conflit, apaisé depuis 2005, était ravivé par des véléités indépendantistes au Sud. Si on ajoute que selon Jospeh Ngere, gouverneur de la province de "Western Equatoria", Khartoum arme la LRA par l'intermédiaire des groupes de rebelles tchadiens qu'elle soutient contre Idriss Deby, on commence à bien appréhender la menace que constitue la LRA pour la région.

De fait, plus personne ne croit aux promesses de paix de Joseph Kony. Les organisations de défense des droits de l'homme réprochent même au gouvernement ougandais de Museveni de tenter d'arracher un accord contre la promesse d'une protection vis à vis de la cour de justice internationale. Côté LRA, les purges s'intensifient, et le bras droit de Kony, Vincent Otti, aurait été exécuté pour "déloyauté", tout comme son remplaçant annoncé, Okot Odhiambo... information démentie pour ce dernier, qu'on aurait aperçu aux côtés de Kony.

Perspectives bien sombres pour les civils du Sud-Soudan, du Nord-Ouganda, du Nord-est du Congo et du Sud-Est de la Centrafrique, exposés à une guérilla sans but ni objet précis, qui tente de légitimiser son combat en parlant maintenant de "démocratie et de droits de l'homme".


Aucun commentaire: